Peut-on acheter un bien occupé sans craindre des litiges sur les travaux ?

L'acquisition d'un bien immobilier occupé peut sembler une opportunité intéressante, mais elle comporte son lot d'inconvénients, notamment en ce qui concerne les travaux effectués par les précédents propriétaires ou locataires. Cette situation soulève des questions importantes sur la responsabilité, la due diligence et les protections contractuelles nécessaires pour sécuriser son investissement. Il est également nécessaire de savoir quels travaux sont à la charge du locataire, sur dougs.fr vous trouverez les informations utiles à ce sujet.

Cadre juridique de l'achat d'un bien occupé en France

En France, le Code civil et la loi du 6 juillet 1989 régissent les principales dispositions relatives à ce type de transaction. L'achat d'un bien loué ne met pas fin au bail en cours. L'acquéreur devient le nouveau bailleur et doit respecter les termes du contrat de location existant.

L'une des particularités de l'achat d'un bien occupé est la nécessité de vérifier les clauses du bail en vigueur. Ces clauses peuvent avoir une influence sur les droits et obligations du nouveau propriétaire, notamment en ce qui concerne la réalisation de travaux.

Par ailleurs, la loi ALUR de 2014 a renforcé les obligations d'information du vendeur envers l'acheteur. Ce dernier doit désormais être informé de l'ensemble des travaux réalisés dans le bien au cours des trois dernières années, y compris ceux effectués par le locataire avec l'accord du propriétaire.

Évaluation des risques liés aux travaux antérieurs

L’évaluation des risques liés aux travaux antérieurs permet de déterminer les responsabilités de chaque partie et de comprendre qui doit effectuer les réparations.

Diagnostic technique global (DTG) et ses implications

Le Diagnostic Technique Global (DTG) permet d'évaluer l'état général d'un bien immobilier, particulièrement dans le cas d'un achat de bien occupé. Ce diagnostic, bien que non obligatoire dans tous les cas, peut révéler des informations utiles sur les travaux antérieurs et l'état général de la structure. Le Diagnostic Technique Global (DTG) évalue notamment l’état des espaces et équipements communs, examine la conformité du syndicat des copropriétaires aux obligations légales et réglementaires, propose des améliorations pour la gestion technique et patrimoniale de l’immeuble, et vérifie le diagnostic de performance énergétique.

Les résultats du DTG peuvent mettre en lumière des travaux nécessaires qui n'auraient pas été réalisés ou des modifications non conformes effectuées par les précédents occupants.

Responsabilité du vendeur pour vices cachés

Le vendeur est tenu de garantir l'acheteur contre les défauts cachés du bien vendu qui le rendent impropre à l'usage auquel on le destine, ou qui diminuent tellement cet usage que l'acheteur ne l'aurait pas acquis, ou n'en aurait donné qu'un moindre prix, s'il en avait eu connaissance.

Dans le contexte des travaux antérieurs, il est nécessaire de déterminer si des modifications structurelles ou des rénovations ont pu introduire des vices cachés. Par exemple, une isolation mal réalisée pouvant entraîner des problèmes d'humidité, ou des travaux électriques non conformes présentant des risques de sécurité.

Garantie décennale et son application rétroactive

La garantie décennale est une assurance obligatoire qui couvre les dommages qui compromettent la solidité de l'ouvrage ou qui le rendent impropre à sa destination pendant dix ans après la réception des travaux. Dans le cas d'un bien occupé, il faut vérifier si des travaux importants ont été réalisés dans les dix dernières années et si la garantie décennale s'applique encore.

Cette garantie peut s'avérer précieuse pour l'acheteur si des problèmes liés à ces travaux se manifestent après l'acquisition. Mais il faut savoir que la garantie est attachée aux travaux et non à la propriété du bien. Ainsi, même si le bien change de propriétaire, la garantie continue de s'appliquer pour la durée restante des dix ans.

Processus de due diligence pour l'acheteur

Analyse des procès-verbaux d'assemblées générales de copropriété

L'analyse des procès-verbaux des assemblées générales de copropriété est une étape indispensable du processus de due diligence lors de l'acquisition d'un bien occupé. Ces documents fournissent des informations précieuses sur les travaux votés ou envisagés dans les parties communes, les éventuels litiges entre copropriétaires, les décisions prises concernant l'entretien de l'immeuble, ainsi que les budgets alloués aux différentes dépenses, y compris les travaux.

Il faut également prêter attention aux mentions de travaux privatifs ayant un effet sur les parties communes, car ceux-ci peuvent être source de litiges futurs.

Inspection détaillée avec expert en bâtiment

Faire appel à un expert en bâtiment pour une inspection détaillée du bien est prudent, particulièrement dans le cas d'un bien occupé. Cet expert pourra évaluer l'état général du bien et la qualité des travaux antérieurs, identifier les éventuels vices cachés ou problèmes structurels, estimer les coûts des réparations ou mises aux normes nécessaires, vérifier la conformité des installations aux normes actuelles et fournir un rapport détaillé qui pourra servir de base de négociation ou de protection juridique.

L'intervention d'un expert peut mettre en lumière des défauts imperceptibles pour un œil non averti, tels que des travaux réalisés de manière inadéquate ou des modifications non conformes aux règles d'urbanisme.

Vérification des autorisations d'urbanisme (permis de construire, déclarations de travaux)

La vérification des autorisations d'urbanisme permet de s'assurer que tous les travaux réalisés dans le bien ont été effectués en conformité avec la réglementation en vigueur. L'acheteur doit demander et examiner les permis de construire pour les travaux importants, les déclarations préalables de travaux pour les modifications mineures ainsi que les certificats de conformité délivrés après l'achèvement des travaux.

Il faut vérifier que ces documents correspondent aux travaux effectivement réalisés dans le bien. Toute discordance peut être source de litiges futurs et pourrait même entraîner l'obligation de remettre le bien dans son état d'origine, aux frais du nouveau propriétaire.

Clauses contractuelles protectrices

Condition suspensive d'obtention des documents relatifs aux travaux

Une clause de condition suspensive, relative à l'obtention des documents liés aux travaux, stipule que la vente ne sera conclue que si certains documents sont fournis par le vendeur, tels que les factures des travaux réalisés, les attestations d'assurance décennale des entreprises ayant effectué les travaux, les procès-verbaux de réception des travaux, les autorisations d'urbanisme correspondantes.

Cette condition permet à l'acheteur de se retirer de la vente sans pénalité si les documents requis ne sont pas fournis ou s'ils révèlent des problèmes potentiels.

Garantie de parfait achèvement et son application

La garantie de parfait achèvement, bien qu'elle s'applique principalement aux constructions neuves, peut également être pertinente dans le cas de travaux importants réalisés récemment dans un bien occupé. Cette garantie oblige l'entrepreneur à réparer tous les désordres signalés par le maître d'ouvrage, soit au moyen de réserves mentionnées au procès-verbal de réception, soit pendant l'année qui suit la réception des travaux. Lors de l'achat de bien occupé, il est conseillé de vérifier si des travaux récents sont encore couverts par cette garantie et si elle peut être transférée au nouveau propriétaire.

Clause de non-recours et ses limites légales

Les clauses de non-recours sont parfois utilisées dans les contrats de vente pour limiter la responsabilité du vendeur concernant l'état du bien vendu. Toutefois, elles ne peuvent pas exonérer le vendeur de sa responsabilité en cas de dol (tromperie intentionnelle), de vices cachés dont le vendeur avait connaissance, du non-respect des obligations légales d'information.

Recours et résolution des litiges après l'acquisition

Procédure de médiation immobilière

En cas de litige concernant des travaux découverts après l'acquisition d'un bien occupé, la médiation immobilière peut être efficace pour résoudre le conflit. Cette procédure, moins formelle et souvent plus rapide qu'une action en justice, permet aux parties de trouver un accord à l'amiable avec l'aide d'un tiers neutre et qualifié.

La médiation préserve les relations entre les parties, est moins coûteuse qu’une procédure judiciaire, permet une grande souplesse dans la recherche d'alternatives et assure la confidentialité des échanges. Toutefois, le recours à la médiation n'empêche pas, en cas d'échec, de poursuivre ensuite une action en justice. C'est souvent une étape préliminaire recommandée pour tenter de résoudre les conflits de manière amiable.

Action en garantie des vices cachés : délai et modalités

L'action en garantie des vices cachés doit être intentée dans un délai de deux ans à compter de la découverte du vice. Ce n'est pas la date d'achat qui est prise en compte, mais bien la date à laquelle le vice a été découvert. Pour engager une action en garantie des vices cachés, l'acheteur doit prouver l'existence du vice, le caractère caché du vice au moment de l'achat et l'antériorité du vice à la vente.

Expertise judiciaire selon l'article 145 du code de procédure civile

Dans les cas les plus complexes, notamment lorsque des travaux importants sont en cause, l'expertise judiciaire selon l'article 145 du Code de procédure civile peut s'avérer nécessaire. Cette procédure permet de demander au juge la désignation d'un expert judiciaire avant tout procès pour établir ou conserver des preuves.

L'expertise judiciaire présente un rapport détaillé et objectif sur l'état du bien et la qualité des travaux. Les conclusions de l'expert sont une base fiable pour une négociation ou une action en justice. De plus, cette analyse peut mettre en évidence des problèmes qui n'avaient pas été détectés lors des inspections précédant l'achat. Mais cette procédure peut être coûteuse et prendre du temps. Elle est généralement réservée aux cas où les enjeux financiers sont importants ou lorsque les désordres constatés sont complexes à évaluer.

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